Pour François de Sales, connaître la volonté de Dieu c’est aimer cette volonté car on sait qu’elle exprime l’amour du cœur de Dieu. D’où ses cris de joie : « Ô Théotime, que cette volonté divine est aimable ! Ô qu’elle est aimable et désirable ! Ô loi toute d’amour et toute pour l’amour ! »

Et comme l’amour rend semblables ceux qui s’aiment, si nous aimons la volonté de Dieu, nous devenons nous-mêmes d’une certaine façon une « volonté de Dieu. » C’est le « nom » (évoqué par Isaïe 62,2) que Dieu nous donne : « L’âme qui aime Dieu est tellement transformée en la volonté divine, qu’elle mérite plutôt d’être nommée volonté de Dieu, qu’obéissante ou sujette à la volonté divine : dont Dieu dit par Isaïe qu’il appellera l’Église chrétienne d’un nom nouveau que la bouche du Seigneur nommera, marquera et gravera dans le cœur de ses fidèles. Puis, expliquant ce nom, il dit que ce sera : ma volonté en elle ; comme s’il disait qu’entre ceux qui ne sont pas chrétiens, un chacun a sa volonté propre au milieu de son cœur, mais parmi les vrais enfants du Sauveur chacun quittera sa volonté, et il n’y aura plus qu’une volonté maîtresse, régente et universelle qui animera, gouvernera et dressera toutes les âmes, tous les cœurs et toutes les volontés ; et le nom d’honneur des chrétiens ne sera autre chose sinon : la volonté de Dieu en eux ; volonté qui règnera sur toutes les volontés et les transformera toutes en soi, de sorte que les volontés des chrétiens et la volonté de Notre-Seigneur ne soient plus qu’une seule volonté. Ce qui fut parfaitement vérifié en la primitive Église, lorsque, comme dit le glorieux saint Luc, en la multitude des croyants il n’y avait qu’un cœur et qu’une âme (Ac 4, 32). »

« La vie, dit le Psalmiste, est en la volonté de Dieu (Ps 29, 6). C’est ce que ne comprend pas la personne qui suit le chemin du démon« transgresseur », comme le roi de Tyr qui « avait mis son cœur comme le cœur de Dieu : car l’esprit révolté veut que son cœur soit maître de soi- même et que sa propre volonté soit souveraine comme la volonté de Dieu. » (Ez.28,2) Baptisés, nous avons fait le choix inverse : « O Seigneur éternel, ne le permettez pas ! mais faites que jamais ma volonté ne soit faite, mais la vôtre (Lc 22, 42). Nous sommes en ce monde, non point pour faire nos volontés, mais celles de votre bonté qui nous y a mis. Il fut écrit de vous, ô Sauveur de mon âme, que vous fassiez la volonté de votre Père éternel ; et par le premier vouloir humain de votre âme, à l’instant de votre conception, vous avez embrassé amoureusement cette loi de la volonté divine et l’avez mise au milieu de votre cœur pour y régner et dominer éternellement : hé, qui fera la grâce à mon âme qu’elle n’ait point de volonté que la volonté de son Dieu ! » Quand notre amour pour la volonté de Dieu grandit, nous sommes prêts à suivre, non seulement les commandements, mais encore les conseils qui « ne nous sont donnés que pour plus parfaitement observer les commandements. » Nous devenons capables de répondre aux simples désirs de Jésus, notre Roi. Alors, Dieu exauce non seulement notre prière, mais encore notre seul désir ; « tant il est favorable et propre à faire la volonté de ceux qui l’aiment (Ps 144, 19). »

Ainsi grandit en nous la confiance et nous sommes heureux de répondre à l’amour par l’amour : « Les âmes nobles n’ont pas besoin d’un plus fort motif pour embrasser un dessein que de savoir que le Bien- aimé le désire : “Mon âme, dit l’une d’elles, s’est écoulée soudain que mon ami a parlé” » (Ch. 5, 6).

François CORRIGNAN